dimanche 15 octobre 2023

2) MOULINS DE PLOUVORN

"Des vallons, des ruisseaux, des prairies, des terres bien cultivées et abondantes en grains, lin et fruits pour le cidre, voilà ce que ce territoire présente à la vue", nous dit Jean Ogée en 1845. Il remarque alors à Plouvorn sept étangs et canaux et 15 moulins à eau. Nous en avons retrouvé 18 dont douze sur l'Horn et ses affluents. A-t-on pu en compter d'autres en des temps plus anciens. Possible. Au village de Kerillo, par exemple, se rencontre une lande nommé Goarem Coz-Milin. Nous sommes là à proximité de Troërin où existent aussi plusieurs parcelles nommées Al Lenn-Coz.

Quinze ans plus tôt, en 1830, eut lieu l'évaluation des revenus de toutes les propriétés apparaissant sur le cadastre qui venait d'être établi. l'assemblée municipale, dans ses délibérations, réserva un point particulier aux moulins. Ils étaient déjà arrêtés au nombre de 15, ce qui ne refletait pas la situation exacte de l'époque car ils étaient, nous l'avons dit, 18. Jean-Marie Le Bras, l'expert, signa le procès-verbal le 30 mai 1830 en compagnie du contrôleur des contributions directes, le sieur Gaultier,  du maire, G. Le Roux et de son adjoint, Jean Couloigne, d'un notable et l'on ne sait à quel titre : Boscals de Reals, propriétaire du manoir et moulin de Troërin. Enfin de 18 signatures, toutes ou presque de meuniers Ainsi relevons-nous les paraphes de Hervé Le Goff, Jean Paugam, H: Kerboas, Hervé Tanguy, Ollivier Rohel, Pluchon, d'une famille de farineux mais aussi de propriétaires résidant au bourg, François Crenn, V: Goarant, Jean Urien, Joseph Roguès, Yves Lérec, J: Méar, Yves Le Guen, Olivier Mingan, Laurent Spagnol, Y: Milin, F. Argouarch et Jean M. Allain. Nous allons bientôt les retrouver.

Née à Guiclan, l'Horn traverse Plouvorn du sud au nord en dessinant un axe central. A l'est se remarquent deux autres cours d'eau : le Cosquerou avec les moulins de Traon-Meur et Milin-an-Toul. Plus à l'est encore coule le Guern avec quatre usines : Coatgren, dit encore Coat-Crenn, Milin-Archan, Moulin-Guernemiry et Moulin-Neuf de la Forest ou moulin de la Forêt. 

Le Cosquerou et le Guern ont leur source à Guiclan et se rejoignent un peu plus au nord de Plouvorn pour former le Béon. L'ensemble de la commune est par ailleurs constellé de nombreux douets à rouir le lin. 

 Le bureau de contrôle conserve les baux de six moulins de Plouvorn. Ils ont pour noms Mespaul, attesté de 1777 à 1784, Keruzoret, Kerelsquivan, Cosquevorn, dit encore Cosquer-Vorn. Kerdouhic et Kerduher, tous attestés de 1782 à 1791.

Mais revenons spécifiquement sur l'Horn et ses douze moulins dont les meuniers font florès en 1836 quand a lieu le premier comptage de la population. Un siècle plus tard, à la campagne, nos agents recenseurs ne rencontreront plus que des cultivateurs, des journaliers ou encore des artisans. En 1946, plus aucun meunier n'est recensé sur la commune. Il en restait pourtant...

MOULIN NEUF

 

 Historique de propriété

Moulin-Neuf se rencontre aussi sous la forme de Milin-Nevez, Moulin-Neuf Kersauzon. Il est situé à la limite de Guiclan. Deux moulins portent le nom de Moulin-Neuf dans la paroisse. L'un sur l'Horn, l'autre sur le Guern.
Le Moulin-Neuf de l'Horn n'est attaché à aucun manoir local. Près de la porte donnant sur la route se voient les armoiries des Vieux-Pont, sieurs de Coatmeur, de Daoudour et de Landivisiau, paroisse de Plougourvest qui blasonnaient d'argent à dix annelets de gueules. C'est une famille originaire de Normandie qui donna un vice-amiral de Bretagne en 1593, Alexandre, époux de Renée de Tournemine, dame de Coëtmeur. Celle-ci était veuve de Jean de L’Isle-Adam, mort le 2 août 1589 d’un coup de lance à travers la visière de son casque lors d’un duel contre le seigneur de Marolles au siège de Paris. Il était capitaine des Gardes du Corps du roi Henri III.
Renée de Tournemine donna deux filles à Alexandre de Vieux-Pont. Les armoiries sont donc celles d'Alexandre ce qui daterait le moulin des années 1600. Mais sont-elles bien d'origine ? Le moulin a son puits et sa fontaine. 

La liste des meuniers

– Olivier Le Vezo y est attesté vers 1670.
– Christophe Bellec, 1680.
– Guyon Cornily en 1713.
– Yves Coativy en 1715.
– Maurice Le Saos en 1738,.
– Jeanne Cornily, fille de Guillaume et Anne Bourhis, y voit le jour en 1742
– Jean Argouarch, époux Cornily, en 1750
– Jacques Bourhis et Jean Jézéquel en 1760.
– Guillaume Jacq, époux Jeanne Cornily, en 1767.
– François Léon en 1802.
– Maurice Prigent en 1817
– Louis Allain en 1822.
– Olivier Kerboas en 1836. Il est l'époux de Marie Allain. Leur enfants, Hervé et Anne, sont meuniers. Les six autres attendent leur heure. Ils ont Paul Jacq pour Domestique. Qui n'apparaît plus en 1841. Dans le voisinage est Jean Couloigner, adjoint au maire.
– Hervé Sioc'han en 1870
 – En 1881, les Marc, originaires de Kerlaoudet, à Guiclan, seront les derniers meuniers du Moulin-Neuf avec tout d'abord Jean-Marie et son épouse Marie-Françoise Argouarc'h. Ils ont quatre enfants. Le garçon meunier est Guillaume Nédélec, 37 ans. On compte aussi Anne Bozec, 17 ans, domestique. En 1891 et 1901 les Marc sont toujours à poste.

Fin d'activité
 
En 1933, une nouvelle roue est installée pour actionner quatre meules. Des godets amènent la farine au grenier où elle est tamisée, emballée puis livrée par charrette 
Aux recensements de 1946, les familles Trévien et Marc, de Moulin-Neuf, ont le statut de cultivateurs. Le moulin a pourtant tourné jusqu'en 1965 et son dernier meunier fut Paul Marc, dit Tonton Paul. A 86 ans, le doyen des meuniers du Léon confia ses souvenirs à la presse locale. Dans le quartier, jusqu'en 1928, chacun pétrissait jadis sa pâte et venait la faire cuire au four à bois. On en retirait des miches de 5 kg. Après la retraite de Paul Marc, le mécanisme du moulin fut entretenu par son nouveau propriétaire. En 2014, André Diverrez reçut les résidents de la maison de retraite Saint-Roch en retraçant l'histoire de ce moulin qu'il date du XVIe siècle.